Préambule
L’heure de la rénovation du parc immobilier résidentiel a sonné, un consensus réel semble se dessiner.
Le programme européen, dans son volet « transition énergétique », ouvre la voie à la déclinaison d’un grand plan national en faveur du parc immobilier existant. Le Président de la République en a fait aussi un enjeu national lors de son intervention télévisée du 14 juin.
La Convention Citoyenne reprend à son compte le thème du parc résidentiel existant, avec des propositions parfois surprenantes, ne prenant pas en compte les lois déjà votées (la loi Energie et Climat) ou promouvant des mesures stigmatisantes et insuffisamment consensuelles.
La dépense publique consacrée à la rénovation énergétique pourrait enfin être considérée comme un investissement et non comme une dépense de fonctionnement.
La priorité doit maintenant être portée sur le parc existant et ses standards qualitatifs.
Le parc existant social a fait et continue de faire l’objet de politiques de soutien fortes via les programmes ANRU. Cela n’a jamais été le cas pour le parc privé.
D’où une exigence de mise à niveau du parc privé et de mobilisation des bailleurs, personnes physiques, qui auront été mis à l’épreuve de la solidarité dans la période actuelle et dont le rôle est déterminant dans le maintien d’un parc locatif de qualité, menacé par l’obsolescence et la disqualification énergétique.
L’enjeu économique d’un tel plan est aussi sa capacité d’entraînement et de ruissellement sur le secteur du bâtiment, créateur d’emplois locaux qualifiés. L’économie en a besoin à la sortie de la crise.
Le plan proposé est donc un choc de confiance destiné à lever les freins psychologiques et les inhibitions financières.
Il doit être temporaire pour créer un effet d’aubaine.
Ses mesures s’inscrivent dans une temporalité de crise, sur un court terme.
Compléter et Réorienter :
La boîte à outils existe, elle a été récemment réactualisée. Les moyens, quelque peu disparates, ne manquent pas (ANAH, Ademe, collectivités…).
Mais ils sont prioritairement orientés sur le parc existant individuel qui fait appel à la décision d’un seul propriétaire. Sur ce segment de marché, il est plus facile de répondre aux besoins.
Le parc existant collectif privé, et notamment celui des copropriétés, est plus difficile à entrainer ; les décisions y sont collectives, les règles de fonctionnement sont plus méconnues.
Seules les copropriétés en difficulté, couvertes par le programme « Habiter Mieux Copropriété » de l’ANAH, qui ne concerne que des copropriétés présentant un taux d’impayés de charges entre 8 et 25% de leur budget, bénéficient des attentions des pouvoirs publics.
La copropriété est restée quelque peu à l’écart de mesures publiques efficaces et pertinentes.
Il reste des « trous dans la raquette », selon l’expression de notre Ministre du Logement, sur deux cibles principales, les copropriétés et les bailleurs-copropriétaires.
Les copropriétés : un fort potentiel de relance économique.
Selon le registre des copropriétés, elles sont quelque 430000, couvrant un parc collectif de plus de 10 millions de logements. Une minorité seulement est à risques. On retrouve dans ce parc collectif, 60% des 6,5 millions de logements locatifs privés. C’est dire l’implication étroite existante entre la copropriété et le parc locatif privé. L’un ne peut s’envisager sans l’autre.
La mise à niveau qualitative du parc locatif privé est dépendante de celle des copropriétés. L’enjeu est donc bien de convaincre les copropriétaires de rénover leur patrimoine et de les aider à franchir les obstacles financiers attachés. Avant de compléter les moyens financiers, les incitations juridiques n’ont pas été toutes levées.
Des novations juridiques ont certes été introduites pour préparer le terreau de l’investissement. Mais ces novations sont restées inachevées.
La nouvelle ordonnance sur les copropriétés du 30 octobre 2019 continue d’ignorer 2 points clés :
- la portabilité des fonds de travaux , pour rassurer,
- la reconnaissance du Plan de travaux quinquennal, pour entraîner.
Les évolutions réglementaires attendues :
- Le fonds de travaux en copropriété a institué une novation en mettant en place une épargne collective : c’est un élément déterminant de financement des travaux.
Après quelques années de fonctionnement, les professionnels ont alerté sur quelques améliorations indispensables pour qu’il prenne sa vraie mesure :
- un quantum plus significatif, surtout quand un plan de travaux se dessine.
- et surtout, la possibilité pour le copropriétaire qui épargne de pouvoir récupérer sa mise, en cas de cession sans réalisation de travaux. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, ce qui constitue un frein majeur à sa mise en œuvre.
Le défaut de ne pouvoir récupérer l’épargne consentie mais non investie, incite seulement le copropriétaire à dévoyer l’utilisation de ce fonds vers des travaux d’entretien faciles à mettre en œuvre mais éloignés des objectifs poursuivis.
L’emploi de ce fonds devrait d’ailleurs être expressément dédié à la réalisation de travaux d’urgence et/ou de travaux globaux de rénovation et/ou de travaux inscrits dans un plan pluriannuel voté par la copropriété.
Proposition :
Il faut rendre ce fonds de travaux « portable », c’est-à-dire remboursable par convention entre les parties devant notaire pour que le fonds de la copropriété soit réalimenté, hors droits de mutation, par l’acquéreur qui doit aussi, si nécessaire, pouvoir le faire financer par son banquier.
En agissant ainsi on ne remet pas en cause le principe et les fondamentaux du fonds mais uniquement les fluctuations de sa trésorerie puisque celle-ci serait reconstituée, à l’euro l’euro, par le nouveau copropriétaire.
Le Plan de travaux quinquennal :
Le grand oublié de la nouvelle ordonnance du 30 octobre 2019.
Les professionnels souhaitaient que ce Plan quinquennal, préparé par un DTG ou un audit que le Conseil syndical peut décider pour gagner du temps, structure la vie de la copropriété et soit un véritable cadre d’action pour les projets d’investissement. Cette omission est regrettable.
Il ne s’agit pas de rendre obligatoire un plan quinquennal, ce qui n’aurait aucun sens dans nombre de copropriétés, mais d’en faciliter et inciter le recours dans celles qui envisagent et ont besoin d’une rénovation globale.
Dans ce cadre, le recours à une AMO doit être incité car elle peut être garante de l’animation et du cadencement du projet global. Les incitations financières seraient réservées ou amplifiées dans le cadre de ce plan quinquennal.
Pour emporter une décision collective, il faut un environnement porteur, lisible et pérenne. La temporalité des prises de décisions dans les copropriétés doit aussi être prise en compte. L’année qui vient, remplit toutes les conditions pour être une année blanche en travaux.
Le rythme des tenues des assemblées générales a été perturbé par l’état d’urgence sanitaire. Nous savons gré au Ministre d’avoir pris la mesure de la difficulté. Il n’en demeure pas moins que les reports, les conditions de tenue de ces AG, la temporalité propre à leur process de décision, auront inévitablement des conséquences négatives sur les décisions de travaux.
Sans compter les risques engendrés par l’augmentation des impayés sur les appels de charges qui fragilise l’assise financière de nombre de copropriétés.
Nos propositions financières :
Simplification, lisibilité, pérennité.
Pour financer une collectivité, il est préférable de privilégier les financements collectifs aux financements individuels. Les aides doivent directement être dédiées aux syndicats de copropriété en lieu et place des aides individuelles, afin de faciliter la lisibilité et la présentation des plans de financement des travaux et la mission mobilisatrice et pédagogique du syndic.
Il est indispensable d’affecter des moyens financiers d’ampleur, faciles d’accès. Les financements doivent fournir un cadre stable pour une prise de décision collective qui mobilise un engagement financier individuel important.
De nombreuses initiatives locales ont été prises dont il faut se féliciter mais qui peuvent rendre complexes les emplois. Le rôle de guichet unique d’information de l’ANAH doit être conforté.
1) Pour l’ensemble des copropriétaires :
Nous proposons d’utiliser le plan européen dans son volet rénovation énergétique pour encourager les investissements des copropriétaires d’une part et ceux des copropriétaires-bailleurs d’autre part.
FICHE 1.
Nous proposons de compléter les aides hétérogènes du dispositif actuel des divers organismes et collectivités, par une mesure phare, simple dans son application, lisible et pérenne, qui prenne en compte le constat qu’une rénovation énergétique s’intègre le plus souvent dans une rénovation globale de la copropriété :
Abaisser la TVA de 10% à 5,5% pour tous travaux de rénovation en copropriété, embarquant des travaux d’économie d’énergie.
A l’identique des travaux réalisés sur les immeubles sociaux dans les zones ANRU.
- Cette baisse de TVA s’inscrirait dans un agenda contraint pour créer un effet d’aubaine motivant : les votes décisionnels des assemblées générales devraient être pris dans un délai de 3 ans.
- Elle s’inscrirait dans l’agenda parlementaire défini par la loi Energie et Climat, qui a fixé la date butoir pour la mise au standard énergétique des logements, à 2028. Cette réduction exceptionnelle de TVA serait attachée à la durée de réalisation de ces travaux, dans un délai maximal de 5 ans, pour garantir la pérennité de la mesure.
- Elle prendrait en compte la complexité du process décisionnel d’une copropriété et la temporalité de ses décisions, en restant applicable pendant la durée du plan quinquennal de la copropriété.
Ainsi, à titre d’exemple, pour un DTG ou audit réalisé en 2020, qui pourrait être décidé par le Conseil Syndical dans le cadre des nouvelles missions que l’ordonnance du 30 octobre 2019 l’autorise à prendre, et pour un plan quinquennal de travaux voté entre 2021 et 2023 (période d’engagement), le bénéfice de la diminution de la TVA pourrait se prolonger pendant 5 ans, (mise en œuvre de la réalisation des travaux), jusqu’en 2028, date à laquelle la loi Energie et Climat prévoit des sanctions pour les logements locatifs qualifiés de « passoires énergétiques ».
Il y aurait ainsi mise en cohérence des délais légaux et des ambitions nationales.
Ce serait une puissante motivation pour les copropriétés à voter les travaux avant 3 ans. Ce programme pourrait s’intégrer dans le futur programme SARE promu par l’ANAH.
FICHE 2.
- Miser sur la prime « MaPrimeRénov » et l’adapter à la spécificité de la copropriété :
La Convention Citoyenne en a fait, à juste titre, un levier fort d’action. Nous souscrivons à cette analyse mais à condition d’adapter son mode opératoire à la copropriété.
- La transformation du CITE en prime (Maprimerénov), appropriée pour des travaux individuels, aura peu d’effet pour les travaux collectifs en copropriété puisque ceux-ci demeurent financés par appels de fonds qui obligent le copropriétaire à continuer à mobiliser sa trésorerie avant la réalisation des travaux.
La transformation du CITE en prime pour améliorer la gestion de la trésorerie de ces travaux rate complètement la cible des copropriétaires.
- Cette prime exclut en outre les copropriétaires ayant des revenus compris dans les deux déciles les plus élevés :
Comment les syndics pourraient-ils promouvoir une aide dans une collectivité dont ils ne peuvent pas connaître les conditions d’éligibilité individuelles ?
Comment définir et traduire cette aide dans un plan de financement à présenter au vote de l’assemblée décisionnaire ?
- Les copropriétaires-bailleurs sont exclus du bénéfice de cette prime :
Une complexité supplémentaire, difficilement compréhensible, dans la mobilisation de cette aide au niveau de la collectivité copropriété. On peut affirmer que les copropriétaires sont globalement exclus de cette prime, dans sa version actuelle, alors qu’ils bénéficiaient du CITE. Il n’y aura donc pas d’effet mobilisateur de cette prime pour les copropriétaires, sauf à en modifier le mode de versement et le mode opératoire.
Faire évoluer « MaPrimeRénov », en copropriété,
- En prime collective directement allouée au syndicat des copropriétaires,
- Evolutive selon le gain de performance objectivé et selon la quote-part de la rénovation énergétique dans la rénovation globale,
- Acquise et versée à l’engagement des travaux, quels que soient le revenu et le statut du copropriétaire,
- Avec un plancher pour les petites et moyennes copropriétés.
Avec une telle évolution, la prime MaPrimeRenov, deviendrait un argument convaincant de promotion pour les syndics auprès des copropriétés.
Mais il y faut les moyens financiers, bien supérieurs à ceux alloués pour les 200 000 primes annuelles objectivées par l’ANAH qui aujourd’hui ne touchent pas la copropriété. L’instruction de ces dossiers collectifs serait plus facile pour l’ANAH et accélèrerait la réalisation du volume de logements rénovés.
FICHE 3.
- Mieux mobiliser les CEE (certificats d’économie d’énergie) pour les copropriétés :
Mobilisable collectivement par le syndicat de copropriétaires, le CEE est une aide adaptée à la copropriété. Certes, la compréhension de ce mode de financement des rénovations énergétiques n’est pas à la portée de tous les copropriétaires. Cela ne facilite pas son usage.
Les CEE sont difficiles à expliquer, d’autant que leur valorisation dépend de fluctuations de marché. Il reste pourtant un moyen de financement plus souple à mobiliser que les aides publiques.
Il s’agit d’une aide à renforcer avec le concours des syndics et il est donc majeur d’en améliorer le mode opératoire.
Les Certificats d’économie d’énergie doivent être :
- simplifiés (il existait 70 fiches de travaux éligibles générant des taux de subventionnement très hétérogènes), la démarche administrative doit être améliorée.
- et surtout mis à l’abri des fluctuations de marché par la couverture des risques de taux, pour tenir compte de la temporalité des décisions de copropriété.
Comment fiabiliser un plan de financement si l’un des facteurs d’équilibre est une variable non contrôlable ?
Quand les cours chutent, les plans de financement peuvent être déstabilisés. La durée des prises de décision et de réalisation des travaux ne peuvent se satisfaire de ces aléas de cours.
Il faut systématiser le versement des 2/3 de leur valeur en début de travaux avec une régularisation sur le dernier tiers après travaux sur contrôle à postériori.
Aujourd’hui, les versements de ces CEE sont au mieux réglés 6 mois après l’envoi des factures. Ils génèrent des problèmes de trésorerie aux copropriétaires.
Le dispositif doit intégrer dans l’éligibilité aux CEE le financement de la mission d’AMO évoquée lors de la mise en place du plan quinquennal.
FICHE 4.
- Une assurance de garantie de performance :
Les travaux de rénovation coûtent cher, la part restante est déterminante dans la prise de décision. Aussi, la perspective du résultat de l’économie énergétique doit être certaine.
Le seul calcul du retour sur investissement est un critère insuffisant et parfois contreproductif. Il ne prend pas suffisamment en compte la « valeur verte » future du logement.
Pour réduire les risques de déception et rassurer sur l’investissement, les travaux de rénovation doivent être accompagnés d’une garantie de résultat de performance, sur le principe de la garantie décennale en matière de travaux.
Sans confiance, pas d’investissement. Ce serait un facteur de décision rassurant pour les copropriétaires lors des prises de décision de travaux.
Certes, les critères d’une garantie de performance énergétique devraient tenir compte de critères subjectifs puisque le résultat de l’économie d’énergie peut aussi dépendre de l’utilisateur final de l’équipement.
Aussi, faut-il encourager les modèles de Tiers Financement et de contrats de performance énergétique. Les professionnels sont demandeurs de ces assurances et moyens d’action.
FICHE 5.
- Enfin faut-il une réponse attractive en termes de financement direct.
L’offre bancaire est difficile à mobiliser sur les emprunts collectifs. Leur mobilisation reste délicate, les syndicats de copropriétaires étant souvent réticents à garantir les défaillances d’un des copropriétaires.
Le parc privé collectif devrait bénéficier de la même sollicitude que le parc public et pouvoir souscrire à une enveloppe d’emprunt de grande ampleur, bonifié, avec une option de différé d’amortissement, mobilisé auprès de la BEI et distribué largement par le réseau bancaire.
Le plan européen en donne l’opportunité. Ces bonifications devraient être progressives selon le quota de rénovation énergétique dans le projet. Ce pourrait être un pan significatif d’un plan national d’investissement.
Le coût de la bonification serait largement équilibré par les recettes fiscales dégagées par les travaux générés. Cette enveloppe serait accessible directement auprès des banques distributrices par les copropriétaires désireux d’emprunter à la place des emprunts collectifs actuels
Compte tenu des montants moyens des rénovations globales, la quote-part restante après aides publiques doit être compatible avec la capacité financière des copropriétaires.
La pratique de l’amortissement, source d’épargne, doit être généralisée.
Il importe donc d’encourager toute forme d’amortissement qui permette de constituer une épargne d’anticipation suffisante.
- C’est l’objectif du fonds de travaux en copropriété.
- C’est aussi le sens de la proposition des professionnels des services immobiliers de faire bénéficier tous les bailleurs du parc privé d’un amortissement, progressif selon le loyer pratiqué. Cela passe par l’harmonisation des fiscalités quel que soit le statut du propriétaire ou la nature de la location.,
Les copropriétaires-bailleurs, qui constituent les principaux investisseurs de l’offre privé locative, en bénéficieraient et trouveraient ainsi une source supplémentaire d’encouragement à leurs investissements en copropriété.
2) Un focus sur les copropriétaires-bailleurs : le lien avec le parc privé locatif
Les copropriétaires-bailleurs sont les mal lotis des dispositifs actuels et pourtant leur rôle est double, en participant ou non aux décisions de rénovation des logements principaux d’une part, mais aussi en participant ou non à la rénovation du parc locatif, pour une grande part d’entre eux en tant que bailleurs.
Le plan doit les cibler de façon spécifique.
Il faut éviter qu’ils ne constituent une force d’opposition ou d’immobilisme lors des prises de décision d’investissement en AG de copropriété, car ils ne bénéficient pas directement des fruits de leurs investissements. Le parc locatif privé est ancien, il a beaucoup vieilli.
Et pourtant, du fait de son taux de rotation élevé (taux moyen de 27% du fait d’une typologie centrée sur des surfaces petites et moyennes), il apporte, par son flux important, une contribution à l’accès au logement des ménages, trois fois supérieure à celle du parc social ; son rôle est crucial.
Par défaut d’entretien, l’offre du parc locatif privé diminue en moyenne de 40 000 logements /an, (soit presqu’autant que la production neuve annuelle en logements neufs Pinel), par obsolescence et inadaptation avec les besoins nouveaux des consommateurs. Ce qui explique un stock d’offre locative relativement stable depuis plusieurs années.
Les mesures complémentaires qui pourraient mobiliser les copropriétaires- bailleurs :
- Le régime du micro-foncier : consentir une dérogation temporaire
Nombre des petits copropriétaires -bailleurs sont sous ce régime fiscal par souci de simplicité. Ce régime est révisable tous les 3 ans. Le bailleur déduit 30 % de ses revenus fonciers pour solde de dépenses. Il ne peut dès lors déduire le montant des travaux réalisés.
L’obligation inhérente à ce régime de ne pas pouvoir déduire expressément les travaux réalisés sur le bien loué est un puissant facteur d’immobilisme dans les prises de décision de la copropriété.
Proposition : Instituer un moratoire de 3 ans (2021-2023) pendant lequel ces copropriétaires-bailleurs pourraient conserver le régime forfaitaire du micro-foncier avec la possibilité de déduire exceptionnellement de leurs revenus fonciers, les travaux de rénovation.
Ce serait un puissant argument de prise de décision et de levée de blocage dans les copropriétés.
- Le déficit foncier reportable sur les revenus globaux : l’actualiser fortement
Pour les autres copropriétaires-bailleurs, qui sont au régime réel, une mesure pourrait contribuer à lever les obstacles et les freins, en doublant le montant du déficit foncier susceptible d’être déduit des revenus globaux.
Actuellement le plafond du déficit reportable est de 10 700 euros, montant qui n’a pas été réactualisé depuis 1993.
Proposition : Doubler ce montant serait une juste réactualisation et inciterait sans doute à investir.
Cette mesure serait préférable aux solutions parfois envisagées d’instaurer des mesures coercitives stigmatisantes telles que des bonus-malus sur les loyers des logements ayant des DPE de catégories F et G. De telles solutions ont l’inconvénient de faire supporter au locataire l’impact de ces travaux en cas de bonus ou d’appliquer une double peine au bailleur par un sous loyer si la décision de l’AG de la copropriété refusait le vote des travaux.
Nous rappelons à cet égard que si le bailleur pouvait amortir son bien, -ce qui ne lui est pas permis sur le parc ancien-, et donc être capable de constituer une épargne de renouvellement et d’investissement, il dégagerait la possibilité de financer ces travaux de rénovation.
- Le dispositif « Denormandie ancien » : élargir son potentiel d’investisseurs
Ce régime vient d’être récemment élargi territorialement. C’est un point positif.
En revanche, son ADN est calé sur la niche fiscale Pinel, avec ses défauts : il ne s’adresse qu’aux ménages qui paient des impôts et qui investissent dans un nouveau logement.
Il ne concerne pas les propriétaires ou copropriétaires bailleurs actuels qui voudraient rénover leur bien locatif existant.
Proposition : Compléter le dispositif Denormandie ancien, selon la situation du bailleur, avec la mesure ci-dessus d’actualisation du déficit foncier reportable.
Cette décision aurait l’avantage d’élargir le périmètre des investisseurs dans les agglomérations Cœur de Ville.
- Le gel, pendant 5 ans, de toute augmentation de la valeur cadastrale de la TFPB suite aux travaux de rénovation réalisés sur la copropriété :
Cette mesure, qui apporterait modération dans l’évolution de cet impôt, serait perçue favorablement face aux prévisions d’augmentation significative de ces bases. Il pourrait faire l’objet du partenariat passé entre l’Etat et les collectivités pour compenser à ces dernières les pertes de recettes liées au COVID.
Cette proposition vient en contrepoint d’une mesure avancée par la Convention Citoyenne qui propose d’augmenter la TFPB sur les logements qui ne respecteraient pas les objectifs d’économie d’énergie. Un malus qui serait une double peine pour le copropriétaire-bailleur dont la décision de réalisation des travaux lui échappe puisque décidés ou non par la collectivité des copropriétaires.
S’il doit y avoir malus, il doit aussi pouvoir y avoir bonus.
Conclusion :
La rénovation énergétique en copropriété s’intègre presque toujours dans une démarche de rénovation globale.
- S’agissant de la décision d’une collectivité, l’accompagnement doit privilégier l’aide collective au syndicat de copropriété au lieu de l’aide individuelle plus adaptée au propriétaire individuel. Il s’agit de l’évolution essentielle qui est demandée aux Pouvoirs Publics dans leur approche de la rénovation énergétique en copropriété.
L’accompagnement doit aussi prévoir la possibilité d’un financement d’une AMO auprès du syndic.
- Les aides publiques doivent intégrer la temporalité inhérente aux décisions de ces collectivités, elles doivent donc s’inscrire dans la durée de réalisation des travaux et non dans l’annualité budgétaire.
C’est un investissement et non une simple dépense publique budgétaire.
- Les professionnels syndics sont en ordre de marche pour conseiller, accompagner et tenir leur rôle pédagogique et sociétal auprès des syndicats de copropriétaires. Un effort de formation important est entrepris par les organisations professionnelles pour les aider tenir leur rôle sociétal.
Il reste à ajuster les moyens financiers aux besoins réels.