Préambule : Mettre la confiance au cœur de la reprise du marché immobilier
Comme pour beaucoup d’autres secteurs, le marché de l’immobilier ne pourra repartir sans une confiance forte. Le plan proposé par Plurience est un choc de confiance destiné à lever les freins à la reprise rapide du secteur de l’immobilier et à éviter une année blanche en matière de travaux. Bien que notre profession se soit adaptée pour digitaliser une partie de l’activité, la fermeture des agences pendant la période de confinement a eu de fortes répercussions sur la poursuite des transactions immobilières. Fait moins connu, l’état d’urgence sanitaire a également impacté l’activité de gestion des copropriétés, en raison de l’impossibilité de tenir les assemblées générales.
L’ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 a heureusement permis de décaler la période d’expiration des mandats des syndics et des membres du conseil syndical, tout en autorisant la dématérialisation des assemblées générales de copropriétaires entre le 1er juin 2020 et le 31 janvier 2021. Les perturbations apportées dans le fonctionnement des assemblées générales auront des conséquences sur les décisions de réalisation des travaux de rénovation, alors que 40% d’entre elles réalisent annuellement des travaux importants.
Les objectifs gouvernementaux en matière de rénovation énergétique risquent de ne pas être atteints en copropriété entre mi 2020 et mi 2021, au moment où la relance de l’économie sera une exigence nationale. D’autant que les nouvelles modalités de déclinaison du CITE ne sont pas motivantes pour les copropriétaires puisque la prime qui s’y substitue ne résoudra pas leurs problèmes d’avance de trésorerie résultant des appels de fonds avant réalisation des travaux.
La perspective d’une période neutralisée dans les programmes de travaux des copropriétés doit inciter les pouvoirs publics à relancer vivement les mesures en faveur de la rénovation du parc collectif, qui a une incidence sur la rénovation du parc locatif. L’enjeu économique d’un tel plan est aussi sa capacité d’entraînement et de ruissellement sur le secteur du bâtiment, créateur d’emplois locaux qualifiés. L’économie en a besoin à la sortie de la crise.
Les professionnels des services immobiliers peuvent apporter dans cette démarche leur expérience dans la gestion du marché résidentiel privé, marché intermédié à hauteur de 90% en Copropriété, de 40 % en Gérance Locative, et de 50 % en Transaction.
Le retour de la confiance doit permettre de relever les défis suivants :
- Encourager les copropriétaires à investir dans la rénovation de leurs copropriétés et les copropriétaires-bailleurs à investir sur le parc locatif existant ;
- Sécuriser les relations entre bailleurs et locataires ;
- Solvabiliser les acquéreurs et les ménages modestes afin de ne pas réserver l’accès à la propriété à un petit nombre ;
Donner la priorité au plan de rénovation du parc immobilier privé existant, en consacrant un volet spécifique de ce plan à la copropriété
Faire de la rénovation énergétique la clef de voûte du plan de relance post-épidémie
Le programme envisagé par l’exécutif européen dans son volet « transition énergétique » ouvre la voie à des déclinaisons nationales de grande ampleur en faveur du parc immobilier existant. La rénovation énergétique est vue par beaucoup de décideurs publics comme l’un des éléments répondant au triptyque sous-jacent au plan de relance :
- Créer des emplois non délocalisables
- Soutenir l’offre et la demande
- Réconcilier croissance économique et développement durable
Si nous partageons l’objectif, nous sommes plus partagés sur les moyens de mettre en œuvre cette rénovation énergétique. Nous rappelons tout d’abord que les travaux de rénovation énergétique en copropriété s’inscrivent souvent dans un programme global de travaux. C’est donc dans cette approche globale et dans cette temporalité que doivent s’intégrer les mesures à prendre.
Compléter les aides vers les copropriétaires et les copropriétaires-bailleurs
Selon le registre des copropriétés, elles sont plus de 430 000, couvrant un parc collectif de plus de 10 millions de logements. On retrouve dans ce parc collectif, 60% des 6,5 millions de logements locatifs privés. C’est dire l’implication étroite existante entre la copropriété et le parc locatif privé.
Par défaut d’entretien, l’offre locative « durable » diminue en moyenne de 40 000 logements /an, (soit presqu’autant que la production neuve annuelle en logements neufs Pinel), par obsolescence et inadaptation avec les besoins nouveaux des consommateurs.
La mise à niveau qualitative du parc locatif privé est donc dépendante de celle des copropriétés.
Cette crise est d’une nature entièrement différente de celles déjà vécues, puisqu’il ne s’agit pas ici de reconstruire, mais bien de relancer les dynamiques d’avant crise. C’est pourquoi la priorité doit être portée sur le parc existant et ses standards qualitatifs. Le parc social existant a fait et continue de faire l’objet de politiques de soutien fortes via les programmes ANRU.
Cela n’a jamais été le cas pour le parc privé. Il s’agit donc d’une opportunité de remettre à niveau ce parc en mobilisant tous les acteurs du secteur, et notamment les bailleurs, qui ont participé à l’effort de solidarité au cours de la crise, et dont le rôle est déterminant dans le maintien d’un parc locatif de qualité, actuellement menacé par l’obsolescence et la disqualification énergétique.
La boîte à outils existe, elle a été récemment réactualisée. Les moyens, quelque peu disparates, ne manquent pas (ANAH, Ademe, collectivités…). Mais ils sont prioritairement orientés sur le parc existant individuel qui fait appel à la décision d’un seul propriétaire.
Le parc existant collectif privé, et notamment celui des copropriétés, est plus difficile à entraîner ; les décisions y sont collectives, les règles de fonctionnement plus méconnues.
La collectivité que représente l’assemblée générale est hétéroclite et suppose que chacune de ses composantes, – copropriétaires résidants, copropriétaires bailleurs -, y trouve son intérêt.
Nos propositions pour encourager la copropriété à entreprendre les travaux de rénovation nécessaires
PROPOSITION 1 : AUTORISER LA PORTABILITÉ DES FONDS DE TRAVAUX
OBJECTIF — Permettre le remboursement du fonds de travaux non dépensé en cas de cession d’un lot.
Les sommes versées au titre du fonds de travaux sont attachées aux lots et définitivement acquises au syndicat des copropriétaires. Elles ne donnent pas lieu à un remboursement par le syndicat à l’occasion de la cession d’un lot. Cet élément constitue aujourd’hui un frein pour le copropriétaire qui souhaite récupérer sa mise en cas de cession sans réalisation de travaux.
Il faut rendre ce fonds de travaux portable, c’est-à-dire remboursable par convention entre les parties devant notaire pour que le fonds de la copropriété soit réalimenté, hors droits de mutation, par l’acquéreur qui doit aussi, si nécessaire, pouvoir le faire financer par son banquier.
PROPOSITION 2 : INSTITUER UN PLAN PLURIANNUEL DE TRAVAUX
OBJECTIF — Encourager la copropriété à réaliser un plan de travaux quinquennal.
Ce devait être une piste d’action de la nouvelle ordonnance sur la copropriété. La mesure n’a pas été retenue.
Les professionnels souhaitent que ce Plan quinquennal, préparé par un DTG ou un audit, structure la vie de la copropriété et soit un véritable cadre d’action pour les investissements. L’année qui vient remplit toutes les conditions pour être une année blanche en travaux. Le rythme des tenues des assemblées générales a été perturbé par l’état d’urgence sanitaire. A cela s’ajoutent les risques engendrés par l’augmentation des impayés sur les appels de charges qui fragilise l’assise financière de nombre de copropriétés.
D’autant que la transformation du CITE en prime (MaprimeRenov’), appropriée pour des travaux individuels, aura peu d’effet pour les travaux collectifs en copropriété puisque ceux-ci demeurent financés par appels de fonds qui obligent le copropriétaire à continuer à mobiliser sa trésorerie avant de percevoir l’aide. Il n’y aura donc pas d’effet mobilisateur de cette aide pour les copropriétaires, sauf à en modifier le mode de versement.
PROPOSITION 3 : APPLIQUER UN TAUX DE TVA REDUIT AUX TRAVAUX DE RÉNOVATION DES COPROPRIÉTÉS ENTRE 2021 ET 2023
OBJECTIF — Une aide lisible et simple d’application, mais aussi pérenne sur la durée des travaux
Tous travaux de rénovation embarquant des travaux d’économie d’énergie, votés par une copropriété pendant 3 ans, de 2021 à 2023, bénéficieraient du TVA réduit de 5,5%, à l’identique des travaux réalisés sur les immeubles sociaux dans les zones ANRU.
Cette réduction exceptionnelle et temporaire de TVA serait maintenue pendant 5 ans après ces 3 années, pour permettre la réalisation effective des travaux si ceux-ci devaient dépasser les délais de mobilisation de l’aide.
Elle serait attachée à la durée de réalisation de ces travaux, dans le cadre d’un plan quinquennal, pour garantir la pérennité de la mesure.
À titre d’exemple, pour un DTG ou audit réalisé en 2020, et un plan pluriannuel de travaux voté entre 2021 et 2023 (période d’engagement), le bénéfice de la diminution de la TVA pourrait se prolonger pendant 5 ans, (mise en œuvre de la réalisation des travaux), jusqu’en 2028, date à laquelle la loi Climat et Énergie prévoit des sanctions pour les logements locatifs qualifiés de « passoires énergétiques ».
Il y aurait ainsi mise en cohérence des délais légaux et des ambitions nationales. Ce programme pourrait s’intégrer dans le futur programme SARE promu par l’ANAH.
Un focus sur les copropriétaires-bailleurs pour faciliter les décisions de travaux de la copropriété et lever les freins juridiques et financiers à travers 4 mesures :